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CLIN D’ŒIL DU NIGER

CLIN D’ŒIL DU NIGER

CLIN D’ŒIL DU NIGER est une tribune d'animation critique de l'actualité politique africaine. Elle met un point d'honneur à la défense de la démocratie et des droits humains. Elle se propose d'assurer une veille citoyenne en livrant des appréciations empiriques des décisions politiques susceptibles d'entrer en collision avec la normalité démocratique et les droits fondamentaux des citoyens.


M. MAHAMADOU ISSOUFOU est un imposteur !

Publié par Maitre Bachir sur 18 Novembre 2015, 01:36am

M. MAHAMADOU ISSOUFOU est un imposteur !

Selon la conception généraliste, l’instauration d’un Etat de droit, idéal de toute démocratie, suppose la réunion de plusieurs composantes essentielles que l’on peut dès lors qualifier de composantes formelles de la démocratie à savoir : des élections libres, transparentes et inclusives, la liberté des médias, l’existence des partis d’opposition et une société civile organisée. Mais, l’énoncé de jure de ces principes, et leur application plus ou moins effective, ne peuvent suffire pour l’instauration d’une véritable démocratie, sachant qu’au Niger, on assiste même à des marches arrière dans une phase censée être de consolidation des acquis démocratiques.

En effet, depuis son indépendance, le Niger a été confronté à un échec du « développement ». Il faut entendre l’appauvrissement de la majorité des populations, que l’on raisonne en termes d’évolution du produit par tête ou de satisfaction des besoins de base, comme la santé et l’éducation. Avec pour conséquence un taux de grande pauvreté élevé et en augmentation.

Cette situation démontre bien la réalité politique nigérienne que l’on peut résumer comme la cassure entre l’oligarchie politico-économique détentrice du pouvoir et les masses populaires, et comme l’incapacité de cette oligarchie à enclencher un processus de développement durable et inclusif. Or, le Niger ne souffre pas et n’a pas souffert de phénomènes traumatiques à l’instar de beaucoup de pays africains ; pourtant le pays est aujourd’hui parmi les plus pauvres du monde (Avec un taux de pauvreté de 46,3 % selon la Banque mondiale). Profitant du mystère enveloppant ce paradoxe, aucun acteur des sphères de pouvoir ne se sent responsable. Désemparée, la population se réfugie derrière un fatalisme démobilisateur, tandis que de l’extérieur, journalistes ou analystes, à défaut d’explication, n’hésitent plus à brosser un tableau apocalyptique d’une société à la dérive où règnent à grande échelle corruption et trafics en tous genres.

C’est dans ce contexte de désespoir que M. Issoufou s’est proposé avec un ambitieux programme politique, comme la seule alternative pour la renaissance du Niger. Cinq ans plus tard, à l’épreuve des faits, les Nigériens se rendent finalement compte de l’instrumentalisation dont ils ont été victime. Aujourd’hui, à la fin de l’année 2015, les maux sociaux dénoncés depuis toujours n’ont pas varié : corruption, népotisme, insécurité, inégalité sociale et injustice. La profession de foi ainsi faite par M. Issoufou s’est avérée chimérique. Arrivé à la tête de l’État à titre d’homme providentiel, Issoufou Mahamadou s’est révélé comme un imposteur hors pair. Conscient de son imposture et de la fragilité de son programme, il a systématiquement cherché à renforcer son pouvoir en le concentrant, en le personnalisant, et en s’assurant le soutien d’un groupe restreint d’acteurs influents. Ce qui explique le tapis déroulé aux forces impérialistes, faisant du Niger, une base arrière de la reconquête de l’Afrique, ce, au mépris du principe de souveraineté.

Enfermé dans une logique de court terme, il n’a à aucun moment cherché l’appui de la grande masse en répondant aux aspirations populaires. Au contraire, l’oubli et l’exclusion de cette grande majorité, essentiellement rurale, a été une constante de la politique menée par son régime depuis cinq ans. La société nigérienne est ainsi fortement fragmentée. L’incapacité des autorités à assurer un consensus politique stable s’explique par l’existence à ce jour insurmontable d’un hiatus entre un « ordre social » fondamentalement statutaire et hiérarchique qui ne peut être revendiqué mais qui se maintient au fil du temps, et le discours des dirigeants qui, dans un contexte de démocratisation affichée, prétendent être les défenseurs des intérêts de la population. Cette structuration sociale profondément inégalitaire et figée est aggravée par de nombreux autres clivages (villes vs campagnes, capitale vs reste du territoire, élites vs citoyens ordinaires, président et son clan vs reste de la population) qui se sont creusés au fil du temps. Le système clientéliste politique, s’est activement développé jusqu’à atteindre les arcanes du pouvoir au point que l’adhésion au PNDS est devenue un moyen rapide d’ascension sociale et d’affranchissement judiciaire de délinquant réputé.

À aucun moment, le président de la République n’a réussi à maintenir son obligation constitutionnelle de neutralité politique, même si cet engagement a été plus ou moins prononcé. Il semble s’accentuer au cours du temps, passant du rôle de chef de l’Etat au chef de parti, mettant à mal sa crédibilité, une relation à double sens étant mise au jour avec l’instrumentalisation des partis politiques par l’exécutif.

De ce fait, les élites au pouvoir ne sont pas incitées à porter une vision de long terme et à promouvoir les intérêts de la base. Leur stratégie consiste plutôt à mettre en place des alliances avec des groupes potentiellement influents mais aussi dotés d’un pouvoir déstabilisateur. Cependant, ces alliances au sommet de l’État très souvent contre-nature, mouvantes, fragiles et limitées, finissent irrémédiablement, par engendrer l’exclusion et la frustration d’une partie de l’élite. Compte tenu de la faiblesse généralisée des institutions et des organisations, y compris de l’armée, le groupe élitaire exclu cherche à faire tomber le pouvoir en place en mobilisant une population dont les aspirations sont ignorées.
Le Niger semble donc condamné à cette instabilité chronique dont les seuls bénéficiaires sont un cercle restreint d’élites. Seul un processus d’inclusion de la population permettra de casser ce cercle vicieux et d’enclencher le développement du pays. Reste à trouver les acteurs de cette grande transformation car M. Issoufou s’est révélé être un imposteur.

La cyclicité de plus en plus rapprochée des crises et qui nous préoccupe ici, montre en quoi celles-ci ont été rentables à court terme pour ceux qui les ont joués, avec en premier lieu leur accession au pouvoir. Mais elle montre aussi que ces crises peuvent avoir des effets néfastes à plus long terme, en matière de sécurité, de gouvernance ou de destructions du potentiel économique. En tirant la conclusion que le Niger n’est finalement qu’une démocratie de façade, et que cette dernière a plutôt tendance à favoriser les crises politiques. Le Niger semble enfermé dans un cercle vicieux, sachant que l’issue de la dernière crise reste encore incertaine, en dépit de la solution électorale envisagée qui n’augure rien de prometteur.

Maître Bachir

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